En classe à l’école primaire, l’enseignant est le garant du temps. Il jongle sans cesse entre le volume horaire des matières des programmes, les imprévus de la journée et les interventions des différents partenaires. C’est un chef d’orchestre, imposant une cadence à suivre à ses élèves. Toutefois, il doit se rendre à la cruelle évidence ; en donnant une activité à réaliser à ses élèves en temps imparti, tous ne la finissent pas au même moment … voire ne la terminent pas ! Une frustration est alors palpable : « encore 5 minutes ! »

Dès lors, comment articuler le cadre temporel imposé avec le temps de l’apprentissage qui varie pour chacun ? La pédagogie personnalisée et communautaire donne des pistes concrètes pour prendre en compte le rythme de chacun et engager l’élève dans la prise en compte de la contrainte temporelle.

Dans la pédagogie personnalisée, les outils organisationnels sont mis au service de l’élève et l’aident à construire sa gestion du temps. En voici quelques-uns :

• Les programmations constituent un outil à destination de l’élève qui présente l’ensemble des objets de savoir à acquérir dans l’année. La progression d’acquisition de chaque compétence, notée par domaine, est explicitée et permet à l’élève, l’enseignant et les parents de savoir où il en est.
• Le plan de travail est un outil à destination de l’élève qui lui permet de programmer son travail pour la semaine ou la quinzaine en se référant à ses programmations.
• La fiche guide indique à l’élève la démarche d’acquisition d’une compétence en explicitant pas à pas chaque étape de la progression.

Ces outils permettent à l’élève de gérer leur temps, d’abord à court terme.

« Comment articuler le cadre temporel imposé avec le temps de l’apprentissage qui varie pour chacun ? »

En effet, en planifiant ses activités en début de semaine dans son plan de travail, l’élève visualise son organisation temporelle hebdomadaire. A chaque fin de séance, il mesure ce qu’il a accompli. S’il n’est pas allé au bout des tâches qu’il s’était fixées, il prévoit de les finir pour la séance suivante. Aussi, il est courant que les élèves programment des activités qu’ils auraient pensées plus longues que prévu. Ils peuvent alors modifier leur plan de travail en anticipant les activités du lendemain. Dans les bilans de fin de séance et en fin de semaine, les élèves prennent conscience de leur gestion du temps : « je pensais mettre plus ou moins de temps à réaliser cette activité ». Pour cela, la combinaison des outils (sabliers/plan de travail) permet aux élèves de se fixer des contraintes et de les ajuster. Pour autant, les tâches de planification demeurent complexes et certains peuvent éprouver des difficultés à se situer à l’échelle d’une semaine. C’est le cas des élèves qui manifestent de l’anxiété, notamment de performance ou qui ont peu de flexibilité. Prendre le risque de ne pas « remplir son contrat » peut être très anxiogène. Il est alors important de les accompagner dans cette planification. Ils commencent alors par prévoir leurs activités pour la séance. Au cours de l’année, ces élèves deviennent capables d’élargir leur prévision du temps en passant d’un projet d’une séance à quatre hebdomadaires. Là encore, le plan de travail favorise la structuration du temps pour l’élève ; il permet de fixer des objectifs à court terme et de s’organiser dans la gestion de son travail de la semaine au regard de sa programmation ; de planifier son travail et de se projeter ; de s’auto-évaluer par rapport à ses prévisions mais aussi par rapport aux apprentissages.

Quant au temps sur le long terme, l’élève possède une vue d’ensemble des notions abordées dans l’année dans sa programmation. Sa progression est visualisée car les activités réalisées sont complétées au fur et à mesure de leur réalisation. Il prend alors conscience de ce qui est fait et de ce qu’il lui reste à faire. Quelle joie pour lui de mesurer le chemin parcouru ! Cet outil a trois objectifs en lien avec la gestion du temps ; il permet à l’élève d’avoir une vision globale programmée dans le temps des compétences à acquérir, de se situer dans ses apprentissages et de s’auto-évaluer, de comprendre les enjeux des apprentissages et le lien entre eux.

Il n’existe pas de remède miracle pour qu’un élève puisse gérer son temps parfaitement. En revanche, par une implication dans la tâche, et une segmentation visuelle du temps d’activité, l’élève prend conscience du temps qu’il prend. En réalisant des activités inscrites sur une fiche guide, la compétence visée est inscrite ainsi que l’outil didactique. Elle accompagne l’élève dans la démarche d’acquisition en lui permettant de planifier les étapes de réalisation des tâches ; elle constitue un appui spatio-temporel pour les élèves qui ont des difficultés de planification et de mémoire de travail ; elle structure aussi le processus d’apprentissage. Ainsi, les facultés d’organisation développées lui sont bénéfiques pour transposer cette gestion du temps au collège, notamment dans son organisation personnelle pour les devoirs. Pierre Faure affirmait que la libre-adhésion de l’élève favorisait l’apprentissage. Ces outils donnent un cadre à cette liberté afin qu’elle soit source de motivation et favorise un état d’esprit dynamique si précieux pour apprendre, nous confirme aujourd’hui la recherche (Steve Masson, Activer ses neurones).